Faux ! ce message n’est pas de l’armée béninoise

Ce message n'est pas de l'armée béninoise

Référencé, « IMMEDIAT N° 4054/EMAT/B.OPS DU 11 MARS 2021 », un message portant objet : « Consignes relatives en cas de réquisition unités armées de terre » au Bénin fait le tour des réseaux sociaux.  On y retrouve un cachet, la signature et le nom du Contre-amiral Patrick Jean-Baptiste Aho, Chef d’Etat-Major, en bas de page. Dans son contenu, la correspondance ci-contre porte à faire croire que les forces armées béninoises sont instruites à l’effet de ne pas agir en « cas de troubles à l’ordre public orchestrés par les populations sans armes ».  On y lit que les armes affectées aux forces armées « seront dégarnies de leurs chargeurs qui devront être gardés en poches » et que « lesdites armes ne seront portées que pour dissuader ».

Faux !

Ce message intercepté par un lecteur a été soumis à la vérification de Bénin Check Info, service de lutte contre les Infox à Banouto. Des sources sécuritaires contactées sont unanimes, il s’agit d’une fausse correspondance. « Fausse dans la contexture. Fausse dans les termes de rédaction. Fausse dans les appellations de destinataires », a signalé une première source militaire qui attire l’attention sur plusieurs aspects de fausseté du document. « Dans notre pays, le Chef d'État-major Général ne donne jamais des ordres aux unités. On ne parle pas de haute hiérarchie militaire mais de haut commandement militaire », pointe-il d’abord.

A l’examen du message, il fait constater qu’au Bénin, « il n'y a pas de CEMGA » comme on peut le lire sur le document.  Dans, le contenu, note-il, se dégagent « deux grandes idées contradictoires ».  D’un, « l'expéditeur n'est pas le signataire ». Cela se constate à la lecture de la référence, « Immédiat n°4054 *EMAT* /B.OPS du 11 mars 2021 » qui n’est pas conforme à ce qui se fait au Bénin.  « Ce numéro (dont la contexture n'est pas béninois) dit clairement État Major Armée de Terre (EMAT), mais au bas du message, le signataire c'est le Chef d'État-major Général (CEMG) », relève notre expert militaire.

De deux, le CEMGA qui devrait au Bénin signifier CEMG Adjoint est censé être une autorité supérieure de l’armée. Sur le document, il apparaît à côté du CEMGA la mention ATCR qui veut dire (A Titre Compte Rendu). Or, relève notre source, « une autorité supérieure ne rend pas compte à une autorité subordonnée. ».

Une autre source contactée dans la hiérarchie militaire béninoise confirme la fausseté de la correspondance. « Même si le haut commandement n’encourage personne à tirer sur des populations qui manifestent effectivement de façon pacifique, ceci est une fausse correspondance. Elle n’a jamais existé ! », dément ce colonel joint par Banouto.

« Mauvais timbre de l’EMAT (probablement EMAT d’un autre pays), avec signature du CEMG. Parmi les destinataires, l’adjoint au CEMG ( CEMGA), ça n’existe pas au Bénin et il n’y a aucune structure appelée BOPS à l’EMAT ou à l’EMG », relève aussi cette autre source. De plus fait-il constater,  « c’est un message dont la mise en forme est loin d’être télégraphique. Les messages au Bénin comme en France ont la forme télégraphique. Pas d’article, pas de pronom... ». En conclusion martèle-t-il,  c’est « un  faux ! » tout en appelant à la «vigilance », par cette période électorale où « plein de fake » circulent.

Un message trafiqué

En dehors des sources militaires, Bénin Check Info a découvert aux moyens d’outils de recherche qu’il s’agit d’un message trafiqué. Une recherche par image inversée sur google révèle que le même message est apparu sur les réseaux en Côte d’Ivoire en août 2020.  Nathalie Dave, un internaute qui se présente comme une personnalité politique a publié le même document sur sa page Facebook, le 20 août 2020.

« URGENT - À PARTAGER

**MESSAGE DE LA HIÉRARCHIE AUX FORCES DE L’ORDRE ET DE SÉCURITÉ**

Votre hiérarchie vous a transmis un message qui stipule qu’en « AUCUN CAS, IL NE SERA FAIT USAGE DES ARMES CONTRE LES POPULATIONS CIVILES » qui sont « SANS ARME » lors de leurs manifestations. Vos armes « NE SERONT PORTÉES QUE POUR DISSUADER ».

Ce qui signifie que celui qui va tirer sur un civil lors de nos marches pacifiques, sera comptable de son acte et seul responsable. Votre hiérarchie vient de se dédouaner. La CPI cherche client à l’heure-là.

Ralliez-vous au peuple, car le peuple gagne toujours (Chris Yapi’s voice) », a-t-elle écrit à l’appui de l’image du message avec visiblement, l’intention de démobiliser le personnel militaire contre la répression de marches à venir où elle se rendrait.

Le même message apparu en Côte d'Ivoire

En comparaison, on constate que sur le document attribué à l’armée béninoise porte des modifications de date dans le numéro de référence et une apposition du cachet, de la signature et du nom du Contre-amiral Patrick Jean-Baptiste Aho au moyen d’application de montage.