Une publication faite par l’internaute Kimber McDonald fait croire que la constitution révisée à l’Assemblée nationale le 15 novembre 2025 est désormais est en vigueur et l’actuel « président Patrice Talon peut prolonger son mandat pendant les deux prochaines années à compter du 6 avril sauf si lui-même refuse ». D’après les vérifications de Badona, cette affirmation est exagérée. Aucune disposition rendue publique à la date du 27 novembre ne permet encore de soutenir cette affirmation.
« La nouvelle constitution est en vigueur dès aujourd'hui et, en vertu de la nouvelle République, le président Patrice Talon peut prolonger son mandat pendant les deux prochaines années à compter du 6 avril sauf si lui-même refuse », a écrit sur Facebook, Kimber McDonald, une sympathisante du Président Talon dont la page totalise 43 000 abonnés. La publication a enregistré, à la date du 22 novembre 2025, 912 mentions ‘’J’aime’’, 198 commentaires et 15 partages (voir lien archivé de la publication ici).
Plusieurs internautes ont exprimé leur doute au sujet de la véracité de l’information publiée par Kimber McDonald qui président Patrice Talon comme son mentor, source d’inspiration ou encore son écoule. « Arrêtez de publier de fausses informations. Les mandats encourus ne sont pas concernés », a réagi Medard Kponsenon. Connu pour son activisme en faveur du pouvoir de Patrice Talon, Morgan Loko fait partie des internautes sceptiques. « Ce n'est pas vrai », s’oppose-t-il au post de Kimber McDonald.
Cette publication apparaît sur Facebook au lendemain de la révision constitutionnelle opérée à l’Assemblée nationale dans la nuit du vendredi 14 au samedi 15 novembre 2025. Portée par les députés Aké Natondé et Assan Séïbou de la majorité présidentielle, la proposition de loi a été adoptée par 90 voix pour, 19 contre et zéro abstention. La nouvelle constitution porte à 7 ans, la durée du mandat du président de la République renouvelable une seule fois. Le mandat des députés et des maires est porté à 7 ans renouvelables indéfiniment. Le texte consacre également la création d’une nouvelle chambre du nom de Sénat.
Patrice Talon peut-il prolonger son mandat ?
Pour vérifier la rumeur selon laquelle le président Patrice Talon pourrait prolonger son mandat de deux ans après avril 2026, nous avons contacté Modeste Dehotin, il est Docteur en droit public. Selon le spécialiste, la loi votée n'étant pas rétroactive, l’actuel chef d’État ne pourra pas en bénéficier. « Par principe, la loi dispose pour l’avenir. Si nous allons rester dans l’esprit de la loi, l’exécution du mandat de 7 ans pour le président prendra effet à partir de 2026 pour le nouveau président. Quand on prend une loi en cours de mandat concernant le mandat, normalement, la loi doit prendre effet à la fin du mandat. Maintenant, l’interprétation politique peut être tout autre chose. », explique Docteur Modeste Dehotin.
Assan Séïbou, président du Groupe parlementaire Bloc républicain (BR) et co-porteur de la proposition de loi portant révision de la constitution, assure que Patrice Talon ne peut pas prolonger son mandat de deux ans. « Talon s'en va après le 6 avril 2026, c'est terminé. On ne peut pas faire cette rétro-marche-là. Quand un président veut se maintenir au pouvoir, il ne participe pas au choix de son successeur. Le corps électoral, vous le savez, est déjà convoqué. Et quand le corps est convoqué. Le processus électoral est engagé et le président élu le 6 avril le remplacera », a-t-il clarifié au téléphone.
Pour Assan Seibou, l’actuel chef d’État béninois ne peut également pas briguer un nouveau mandat : « Est-ce que Talon peut faire plus de deux mandats dans sa vie ? Non, c'est impossible. Sauf s’il meurt et il renaît. Comme ça, c'est quelque chose que personne ne peut faire. Lui aussi n'est pas en mesure de faire ça ».
Dans la nouvelle constitution adoptée à l’Assemblée nationale, l’article 42 qui prescrit que « nul ne peut, de sa vie, exercer plus de deux mandats de président de la République » n’a pas subi de modification. Patrice Talon étant à sept mois de la fin de son mandat, il ne peut donc se présenter à une nouvelle élection présidentielle.
Le président du groupe parlementaire BR a également assuré que la nouvelle constitution n’a pas créé une nouvelle République, arguant que les fondamentaux, dont la laïcité de l’État et le nombre du mandat présidentiel, n’ont pas été modifiés.
La nouvelle constitution est-elle déjà promulguée ?
A la date du 23 novembre 2025, la nouvelle constitution n’est pas disponible sur le site du secrétariat général du gouvernement du Bénin qui publie continuellement le compte rendu du conseil des ministres, les lois promulguées, les décrets, ordonnances, arrêtés, accords et décisions prises par l’exécutif. La dernière loi promulguée publiée sur le site date du 25 juillet 2025. Il s’agit de la Loi N° 2025-18 du 25 juil. 2025 modifiant et complétant la loi n° 2022-09 du 27 juin 2022 portant loi organique sur la Cour constitutionnelle. Selon l’article 57 de la constitution en vigueur au Bénin, le président de la République assure la promulgation des lois dans les délais de 15 jours qui suivent la transmission qui lui en est faite par le président de l’Assemblée nationale.
La nouvelle constitution votée a-t-elle été déjà promulguée par le président Patrice Talon ? Contactée, la cellule de communication de la présidence n’a pas répondu à notre sollicitation.
Quelles sont les étapes clés de l’adoption à la promulgation ?
Selon Josué Chabi Kpandé, Docteur en droit public, une loi adoptée au Parlement suit un processus bien indiqué jusqu’à sa promulgation par le président de la République. « Lorsqu'une loi est votée de façon générale, elle est transmise au président de la République par le soin du président de l'Assemblée nationale. Techniquement, c'est le secrétariat général qui prépare les courriers, le président de l'Assemblée signe la loi qui a été adoptée avec les détails de comment est-ce que la loi a été adoptée. Cela est envoyé au secrétariat général du gouvernement. Le président reçoit la loi par le biais de son cabinet. Il l'affecte à la cour constitutionnelle qui procède à la vérification de conformité », a expliqué l’enseignant chercheur joint par Badona.
Selon l’universitaire, toutes les lois ne sont pas soumises à la cour constitutionnelle pour vérification de conformité. « Pour les lois organiques, c'est obligatoire de se référer à la cour constitutionnelle. En dehors de cela, pour la constitution, le président de la République a la faculté de le faire. On pourrait dire que pour la constitution, c'est obligatoire, mais le pouvoir constituant n'a pas prévu cela », a-t-il nuancé.
Verdict
Contrairement à l’annonce de l’internaute Kimber sur Facebook, aucun document officiel ne permet de soutenir que le président Patrice Talon peut prolonger son mandat en cours de 2 ans en raison de la révision de la révision de la constitution survenue à l’Assemblée nationale du 14 au 15 novembre 2026. Pour cause, la constitution révisée n’est pas rétroactive.
Faites attention aux messages douteux et n’hésitez pas à contacter Badona pour nous soumettre vos contenus (photo / vidéo / courrier/ texte) pour vérifications !
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