Dans un article publié sur son site, le 05 mai 2025, le média en ligne, 24 heures au Bénin a annoncé qu’il y a “plus de 260 maisons à raser à Houéyiho 1”, un quartier du 11e arrondissement de Cotonou dans le cadre d’un projet de “construction de gare routière”.    D’après les vérifications de Badona sur cette information devenue virale sur les réseaux sociaux, il est vrai que le projet porté par la mairie de Cotonou existe et concerne un domaine habité d’environ 15 hectares.

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Une rue de Houeyiho

‘’Construction d’une gare routière à Cotonou. Plus de 260 maisons à raser à Houéhiyo 1. Les habitants dans l’angoisse d’un départ forcé’’. C’est ce qu’a annoncé, lundi 5 mai 2025, le média en ligne 24 heures au Bénin dans un article de presse sur son site.  

Dans la publication, le journaliste, Marc Mensah, auteur de l’article, souligne que ‘’des résidences, commerces, une école, un temple vodun et autres seront rasées’’ dans le cadre de l'expropriation par la mairie de Cotonou d’un domaine d’environ 15 hectares. Selon l’article de presse, l’espace a été déclaré d’utilité publique dans le cadre d’un projet de construction d’une gare routière. Il mentionne également que la décision a été prise par un arrêté municipal en date du 25 septembre 2024. La production du journal 24 heures au Bénin ne contient ni les références de l’arrêté ni la source des plus de 260 maisons à raser. 

 

Sur Facebook, l’information relayée par plusieurs comptes et pages est devenue rapidement virale (Voir ici, ici et ici). ‘’‼️‼️Bientôt une Gare Routière à Cotonou. Plus de 260 maisons à raser à Houeyiho 1’’. Cette publication de page Facebook Bénin tours a recueilli plus de 730 mentions ‘’J’aime’’, 132 commentaires et 30 partages à la date du jeudi 8 mai 2025 à 13 h 52 minutes. L’information a été relayée par plusieurs autres médias (1,2, 3, 4 et 5). 

 

Pour connaître davantage sur la source des plus de 260 maisons à détruire, Badona a contacté le confrère, auteur de l’article Marc Mensah. ‘’Mon souci était de rendre compte de l’état d’âme des expropriés… J’ai eu de vraies difficultés d’accès aux sources. Les gens ont peur de parler.’’, a-t-il confié. 

 

À la mairie de Cotonou, Serge Comi Dansou, directeur des affaires domaniales et environnementales se garde d’émettre de commentaire sur le sujet à l’heure actuelle, nous a notifié la cellule de communication de la municipalité de Cotonou, lors de notre déplacement sur les lieux, mercredi 7 mai 2025. 

Thibuce Folly, responsable chargé des risques et catastrophes, présente le projet d’expropriation portant sur  15 hectares à Houéyiho comme une nécessité pour l’amélioration du plan d’aménagement de la ville de Cotonou face aux problèmes d’inondation. ‘’Vous n’êtes pas sans savoir que le gouvernement est en train de faire des réformes, est en train de vouloir prendre des zones inappropriées à l’habitation, vous savez que nous avons mal fait le plan d’aménagement de la ville de Cotonou au point où aujourd’hui, nous souffrons des affres donc aujourd’hui, on peut corriger le tir. Mais je sais que ça va demander beaucoup de sacrifices. Ce n’est pas fait peut-être pour faire du mal, mais nous devons protéger la génération future’’, a-t-il justifié.  Pour ce cadre de la mairie de Cotonou, ‘’la seule condition pour régler le problème d’inondation à Cotonou, c’est de sortir les gens des zones inappropriées à l’habitation. Avec la construction de la gare routière, on pourra régler un certain nombre de problèmes’’. 

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Une rue de Houéyiho 1

Contacté, le Porte-parole du gouvernement, Wilfried Léandre Houngbédji a indiqué à Badona qu’il ne saurait répondre à la place de la mairie de Cotonou. ‘’Vous n’avez pas lu que c’est relatif à un projet de la mairie !? Je ne puis répondre’’, a-t-il répondu à notre préoccupation sur l’existence du projet de construction à Cotonou d'une gare routière nécessitant la destruction de centaines de constructions à Houéyiho. 

Notre déplacement à l’arrondissement de Houéyiho 1 pour avoir les explications de l’élu local a été infructueux.

 

Des centaines de parcelles bâties et non bâties touchées 

L’expropriation pour cause d’utilité publique d’un domaine d’environ 15 hectares dans le 11ᵉ arrondissement de Cotonou au profit d’un projet de construction d’une gare routière est une décision du maire Luc Atrokpo. Elle est actée par l’arrêté municipal : N°2024/N°083/MCOT/CC/SE/CJ-DADE/SSLA-SeDoF du 25 septembre 2024 signé du maire Luc Atrokpo. L’arrêté est parvenu aux riverains fin février 2025 par voie d'huissier. L’arrêté consulté par Badona situe le domaine entre : ‘’Le site de China Gezhouba Group Corporation (CGGC) et extension à Vodjè (environ 15 hectares) dans le onzième (11e) arrondissement de la commune de Cotonou’’. 

Un document obtenu de source proche du dossier indique que plus de 260 maisons situées dans le périmètre du domaine déclaré d’utilité publique sont impactées. ‘’Ce projet impacte environ 400 parcelles bâties et non bâties, situées dans le quartier Houeyiho 1, au 11ᵉ arrondissement de Cotonou, dans le cadre de la construction de la gare routière’’, est-il écrit. 

 

Informés de la décision municipale, des propriétaires et présumés propriétaires de parcelles à Houéyiho 1 se sont réunis dans un collectif pour parler d’une même voix. Ils ont adressé un recours gracieux au maire de Cotonou, Luc Atrokpo. Dans la lettre en date du 24 février 2025 consultée par Badona, le Collectif des propriétaires et présumés propriétaires de Houéyiho visés par l’arrêté 2024/N°083/MCOT/CC/SE/CI-DADE/SSLA-SeDoF du 25/09/2024 demande à l’autorité municipale de rapporter ledit arrêté.  Les propriétaires et présumés propriétaires dénoncent la violation de leurs droits fonciers et un vice de procédure. “Monsieur le Maire, l’arrêté ainsi entrepris, porte gravement atteinte à nos droits fonciers sur le domaine, pour avoir acquis et érigé en matériaux définitifs depuis plusieurs décennies nos maisons”, relève le collectif.

 

Opposés à leur expropriation, les propriétaires et présumés propriétaires avancent 04 raisons pour justifier leur opposition. D’un, l’arrêté municipal ‘’ne respecte pas les dispositions prévues par les textes, notamment le Décret N° 2015-013 du 29 Janvier 2015 portant composition et fonctionnement type des commissions d'enquête de commodo et incommodo et d'indemnisation en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, précisément en ses articles 9, 10, 12, 14, 15, 20 et 21’’, a indiqué Joseph Sourou Setemèdé, président du collectif des propriétaires et présumés propriétaires de parcelles à Houéyiho 1 dans une déclaration de presse dont nous avons obtenu copie et relayée par plusieurs médias (1, 2) le 21 avril.

 

L’article 2 du décret cité stipule que “l'enquête de commodo et incommodo, prévue à l'article 228 du code foncier et domanial est une procédure qui consiste à recueillir toutes informations, doléances et observations des populations et des institutions concernant une opération d'intérêt général, notamment l'expropriation pour cause d'utilité publique, les opérations de lotissement, le classement et le déclassement du domaine de l'État et des collectivités territoriales. Cette enquête permet d'assurer la fiabilité, l'équité et la réussite de l'opération projetée.”  

 

En son article 9, le décret fait obligation aux autorités de tenir informés les populations du périmètre concerné, les notables, les autorités et les titulaires de droits réels sur l'immeuble, objet d'expropriation trente (30) jours au moins à l’avance de la date et de l'heure de l’enquête, par convocation adressée aux chefs de village et de quartier.

De deux, le collectif signale une “absence de consultation” préalable : “aucune Administration ne nous a contactés pour discuter de cette procédure de déclaration d’utilité publique.”

De trois, les propriétaires et présumés propriétaires de parcelles constatent une “disproportion du projet” dont  “la superficie déclarée (15 ha) dépasse largement les besoins réels d’une gare routière standard, suggérant une emprise excessive sur des zones habitées”.

En quatre, ils soulignent l’impact que cette expropriation aura sur les habitants. “L’expropriation entraînerait des déplacements forcés de la population, (1/4 des habitants estimés à près de 1.000 personnes, hommes, femmes, jeunes, vieux et enfants). De même, des pertes financières importantes pour les propriétaires et présumés propriétaires (le quartier abrite une école, des commerces locaux, un temple Vodoun (Atingali), et des familles installées depuis des décennies. Leur déplacement risquerait de fragiliser l’économie locale et les liens communautaires.”, rapporte leur président, Joseph Sourou Setemèdé. 

‘’Il ne serait que question de le rapporter et de viser un autre domaine pour la mise en œuvre d'un tel projet. Au regard de ce qui précède, il est clair que l'Arrêté : 2024/N°083/MCOT/CC/SE/CI-DADE/SSLA-SeDoF du 25/09/2024 n'a pas été précédé de l'enquête préalable obligatoire prescrite par les textes en vigueur’’, a déclaré Joseph Sourou Setemèdé. 

 

Au cours de trois réunions tenues le 10 mars 2025, les 6 et 9 mai 2025, la Commission des affaires domaniales et environnementales (CADE) que dirige Prosper Gogoyi a assuré les victimes d’expropriation d'environ 15 hectares à Houéyiho de sa disponibilité à les accompagner pour un consensus autour du dossier. Les riverains demandent quant à eux, l’abandon de tout ou une partie du domaine déclaré d’utilité publique. 

 

Verdict 

L’article du média 24 heures au Bénin selon lequel plus de 260 maisons à raser à Houéhiyo 1 est fondé. Près de 400 parcelles bâties et non bâties seront détruites en faveur d’un projet de construction de gare routière à Cotonou. 

À travers l'Arrêté  2024/N°083/MCOT/CC/SE/CI-DADE/SSLA-SeDoF du 25/09/2024 dont Badona a obtenu copie, le maire Luc Sètondji Atrokpo a déclaré d’utilité publique, un domaine d’environ 15 hectares situé entre le site de China Gezhouba Group Corporation (CGGC) et extension à Vodjè dans le onzième 11è arrondissement de la commune de Cotonou’’. 

 

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